Etudes scientifiques

Les tufières, souvent confondues avec les travertins, sont générées par des dynamiques de formation bio-physico-chimique complexe liées à leur environnement (contexte hydrogéologique, géographique, climatique, biologique et anthropique). Ce type de fonctionnement, relevant de plusieurs champs disciplinaires, rend la définition de ces objets difficiles tant pour les gestionnaires d’espaces naturels que pour la communauté scientifique. Ce milieu, complexe et étroitement relié à son environnement, est ainsi vulnérable à de nombreuses pressions anthropiques tout en répondant à des fonctionnalités socio- écologiques majeures (réserve d’une biodiversité remarquable, améliore la qualité de l’eau,archive des données environnementales passées).

Bien qu’inscrites à l’inventaire des habitats d’intérêt communautaire, les tufières s’avèrent être des formations peu documentées, à l’échelle nationale notamment, en raison d’un manque de diffusion des données et de connaissances des acteurs locaux. Ce constat s’applique également à la zone d’étude du projet Rezoh-tuf qui couvre l’espace commun au bassin du Rhône et à la Région Auvergne-Rhône-Alpes, appelé dans ce travail « bassin Rhône-RA ». Ainsi, seules 547 tufières sont recensées à l’échelle du « bassin Rhône-RA », dont 1/3 ont un état de conservation défini. Ces chiffres, représentant peu l’état réel du territoire, révèlent un profond besoin d’acquérir de nouvelles connaissances par des phases prospectives et d’évaluation standardisée de l’état de conservation.

Pour mener à bien ces actions, le fonctionnement d’un système tufeux doit nécessairement être défini et classifié afin de faciliter sa compréhension, sa gestion et sa restauration. A ce titre, la typologie retenue cadre les différents contextes physiques environnant une tufière et caractérise les formations issues de ces contextes par une approche systémique multiscalaire et pluridisciplinaire. De cet essai, plusieurs typologies emboitées ressortent et sont les reflets des contextes qu’intègre une tufière. Par ordre hiérarchique, sont définis, les contextes hydrogéologique, géographique, géométrique et végétale, les types de sources incrustantes, les différentes morphologies, et enfin, les faciès des dépôts. Leurs influences, variables selon leur évolution, forment une multitude de tufières aux fonctionnements et aux formes très différents.

Les tufières sont des formations carbonatées générées par des processus bio-physico-chimiques complexes. Ce milieu est, en raison de sa complexité, un habitat remarquable aux enjeux socio-écologiques majeurs se déclinant en trois fonctionnalités : hydrologique, biogéochimique et biologique. Toutefois son fonctionnement, répondant à plusieurs champs disciplinaires, le rend sensible et fragile face aux pressions anthropiques (captage, dérivation, extraction, pollution, acidification, surfréquentation, …).
De ce constat, est né le projet de REstauration des ZOnes Humides associées aux TUFières (Rezoh tuf),
dont les actions, déclinées en 3 phases, se déroulent sur l’espace commun au bassin du Rhône et à la
Région Auvergne-Rhône-Alpes appelé « bassin Rhône-RA ». La phase 1 consiste à construire un état de la connaissance reposant sur un corpus bibliographique, une synthèse cartographique et des retours
d’expériences multiscalaires. La phase 2 cherche à conduire sur 4 tufières pilotes aux fonctionnements
dégradées et 1 site référent des opérations expérimentales de suivi et de restauration. Les sites pilotes
retenus sont ceux des Vauthières (Gruffy, 74), de la Touvière (Jarsy, 73), de Darne (Saint-Martin-de-
Clelles, 38) et de Révaou (Vallon-Pont-d’Arc, 07), et, en tufière référente celle de Choranche (Choranche, 38). Enfin, la phase 3 a pour ambition de diffuser la connaissance acquise.
Ces tufières pilotes présentent des contextes environnementaux, des typologies et des dysfonctionnements relativement différents et représentatifs des systèmes tufeux rencontrés en « bassin Rhône-RA ». Ainsi, l’étude de faisabilité Rezoh-tuf présente des mesures de restauration et de suivi adaptées à chaque site, dont les objectifs sont de définir et de proposer des méthodes de suivi reproductibles par les gestionnaires d’espaces naturels non spécialisés.

Le Plan d’actions « Marathon du tuf », livrable du projet Rezoh-tuf, vise à préserver et restaurer 42 formations tufeuses à l’échelle du territoire Rhône-Alpes. Ces zones humides jouent un rôle crucial dans la régulation hydrologique, la séquestration du carbone et abritent une biodiversité spécifique.

Les objectifs principaux de ce plan sont :

1. Protection et conservation des tufières : Mettre en place des mesures pour préserver les formations tufeuses existantes, en limitant les pressions et menaces.
2. Restauration écologique : Intervenir sur les sites dégradés pour rétablir les conditions naturelles favorables à la formation et au maintien des tufs tout en prenant en compte les enjeux socio-économiques existants.
3. Suivi et évaluation : Appliquer et améliorer les suivis Rezoh-tuf pour évaluer l’efficacité des actions menées et ajuster les stratégies de gestion en fonction des contextes.
4. Sensibilisation et mobilisation des acteurs locaux : Informer et impliquer les collectivités, les gestionnaires d’espaces naturels, les associations et le grand public sur l’importance des tufières, les menaces qu’elles subissent et les actions à entreprendre pour leur préservation.

Les zones humides en France ont subi une régression alarmante. Les pressions exercées par les activités humaines sont aujourd’hui exacerbées par les effets du changement climatique et les sécheresses répétées.
Les tufières, formations de dépôts calcaires uniques, ne font pas exception à ces enjeux et présentent, en plus, le désavantage d’être mal identifiées et peu considérées.
Ce guide technique donne des éléments de compréhension de leur fonctionnement ainsi que des outils pour assurer leur gestion et leur restauration, sur la base de retours d’expériences à l’échelle du territoire national.

Date de parution : Décembre 2024 
Rédaction : Elodie Lecornu (IFREEMIS), Elodie Derlande (IFREEMIS), Johan Berthet (Styx 4D), Aurélien Labroche (CBN Massif central), Pauline Debay (CBN alpin), Jean-Michel Faton (groupe Sympetrum), Régis Krieg-Jacquier (groupe Sympetrum).

Travail éditorial : Pascal Faverot 

Mise en maquette : Marion Bijl

Référence : Lecornu E., Derlande E., Berthet J., Labroche A., Debay P., Faton J-M., Krieg-Jacquier R., 2024. Les tufières, de la connaissance à la gestion. IFREEMIS. Collection des « Cahiers techniques de Rhône-Alpes ». 28 p.

Ces actes, retransmettent les interventions et les principaux échanges de la journée d’échanges techniques du 2 décembre 2024 s’inscrivait dans la phase 3 « Diffusion des connaissances » du projet Rezoh-tuf. L’objectif de cette rencontre était avant tout de rassembler les acteurs impliqués dans la gestion et la conservation des tufières afin de partager les avancées scientifiques et techniques du projet. 

À travers diverses interventions et sorties de terrain, les participants ont pu approfondir leur compréhension du fonctionnement des tufières et des méthodes de suivi et de restauration mises en place dans le cadre du projet. Les principaux enjeux étaient donc (1) de transmettre les retours d’expériences sur le projet global et plus particulièrement sur les actions de suivi et de restauration, (2) de favoriser les échanges entre chercheurs, gestionnaires et technicienset (3) d’ouvrir des perspectives via le Plan d’Actions « Marathon du tuf » pour de nouveaux projets de préservation des tufières à l’échelle régionale.